Situé en Silésie, au sud de l'Oder et à 60 kilomètres de Breslau, près de la ville portant le même nom (Rogosnica, en polonais), le KL Gross Rosen est d'abord un Kommando de Sachsenhausen. Ouvert en août 1940, il devient un camp autonome à l'automne 1941 avec ses propres Kommandos de travail.
Le KL Gross Rosen est un camp de concentration de la seconde génération, celle de l'expansion territoriale du Reich vers l'Est. Les facteurs économiques sont à l'origine de son accession au statut de camp autonome : l'aggravation des bombardements alliés sur le Reich nécessite le transfert en Basse Silésie d'usines d'armement menacées par les bombes. Il faut désormais fournir de la main-d'œuvre à ces usines. Le KL Gross Rosen, prévu pour un effectif de 15 à 20 000 détenus, doit constituer ce réservoir de main-d'œuvre.
L'originalité du KL Gross Rosen réside dans la présence, sur la place d'appel, d'un campanile supportant une cloche qui rythme la vie des détenus. Nombre de témoignages évoquent l'aspect monotone du camp, illustré par ses vingt-deux blocs identiques et alignés jusqu'au crématoire. Les détenus sont astreints au travail forcé dans les carrières voisines du camp, particulièrement meurtrières, mais aussi dans des Kommandos intérieurs comme Siemens, Blaupunkt, Wetterstelle ou la filature ; ou encore, à l'extérieur, dans les Kommandos de Kamenz, Aslau, Gassen ou Gross Koschen.
Au départ, le KL Gross Rosen est destiné aux déportés polonais. Puis des prisonniers de guerre soviétiques y sont envoyés, ainsi qu'après l'abrogation de la procédure « Nacht und Nebel »[1] des Français de zone occupée et du Nord-Pas-de-Calais, ainsi que des Belges extraits des prisons allemandes où ils étaient détenus. Les prisonniers « NN » y sont internés dans les blocs 9 et 10, qui peuvent contenir jusqu'à 1 000 détenus chacun. Ils subissent des conditions effrayantes de manque d'hygiène et d'épuisement qui conduisent rapidement à la mort. Les déportés « NN » du Nord-Pas-de-Calais, arrivés pour la plupart par le transport du 30 octobre 1944 en provenance du Zuchthaus Gross Strehlitz, ont payé un lourd tribut dans ce camp, puisque près de 50% sont décédés avant son évacuation en février 1945. On signalera aussi l'immatriculation au camp d'au moins 162 Français arrêtés sur le territoire du Reich.[2]
La mortalité est très élevée au KL Gross Rosen. Le crématoire construit en 1941 est remplacé en 1943 par des fours à quatre chambres et à grand rendement. Sur les 200 000 personnes qui ont séjourné au camp, on estime que 40 000 y ont trouvé la mort.
Quelques mois avant la fin de la guerre, des déportés transférés d'autres camps transitent par Gross Rosen. Ce sont en particulier les détenus des camps de l'Est, comme Auschwitz, évacués face à l'avance de l'Armée Rouge. La surpopulation entraîne la propagation d'une épidémie de typhus et, entre le 8 février et le 23 mars 1945, le camp doit être à son tour évacué vers les KL Buchenwald, Flossenbürg, Dachau et surtout Dora et ses Kommandos dont la Boelke Kaserne à Nordhausen. Plus de 30 000 détenus sont ainsi embarqués dans des trains découverts, conditions entraînant une effroyable hécatombe. Le 5 mai 1945, les troupes soviétiques entrées dans le camp ne trouvent que quelques survivants.
Equipe du Livre-Mémorial
[1] Voir la notice sur cette procédure en introduction du Livre-Mémorial.
[2] Sur cette question, se référer à la notice sur les Français arrêtés sur le territoire du Reich et déportés, en introduction du Livre-Mémorial.