Le KL Neuengamme se situe à environ 25 kilomètres au sud-est de Hambourg, sur la rive droite de l'Elbe, dans une région marécageuse et plate. Le commandement SS décide d'y réactiver une briqueterie désaffectée et d'implanter un camp de concentration. Le premier Kommando de travail, constitué d'une centaine de droit commun venant du KL Sachsenhausen, arrive sur le site le 13 décembre 1938. Le 29 février 1940, arrive un deuxième transport d'environ 120 détenus politiques et témoins de Jéhovah employés à la construction du nouveau camp. Le 4 juin, les détenus, au nombre d'un millier, sont transférés au nouveau camp de détention. Dès lors, le camp de Neuengamme cesse d'être un Kommando de Sachsenhausen et devient un camp autonome.
Le camp central de Neuengamme est un camp d'hommes. Cependant, plus de vingt Kommandos extérieurs de femmes sont créés à partir de 1944 et lui sont administrativement rattachés.
Au total, on estime que 106 000 personnes, dont 13 500 femmes, ont été déportées au KL Neuengamme et dans ses Kommandos extérieurs de travail. Plus de vingt nationalités sont représentées parmi les effectifs du camp, en premier lieu des Soviétiques (34 350), des Polonais (16 900), des Français (11 500), des Allemands (9 200), etc., pour la plupart opposants aux nazis.
Au camp central, les détenus sont employés dans plusieurs types d'activités : extraction et transport de la glaise, production d'éléments préfabriqués en béton, chargement et déchargement des péniches et des wagons, travail à la briqueterie (80 à 100 spécialistes seulement). Les autres Kommandos internes se répartissent entre les ateliers de fabrication de matériels et d'armement installés dans l'enceinte du camp, dont ceux de la DAW (2 500 détenus) ou de la Metallwerke Neuengamme (800 à 1 000 détenus).
Quelque quatre-vingt Kommandos extérieurs du KL Neuengamme sont disséminés essentiellement dans l'Allemagne du nord-ouest. Des Kommandos importants sont créés : dès octobre 1942, à Drütte, pour la production de munitions (plus de 2 000 hommes) ; en mars 1943, sur l'Île d'Aurigny-Alderney, pour construire des fortifications (1 000 hommes) ; en juin et juillet 1943, à Bremen-Farge pour construire la base sous-marine Valentin (2 000 hommes) et à Hannover-Stöcken pour produire des accumulateurs de sous-marins (1 500 hommes). Les travaux de forces prévales dans tous les autres Kommandos extérieurs : déblaiements, terrassements, fortifications, production de munitions, matériel militaire, etc. A partir de mars 1945, ces Kommandos deviennent prépondérants dans les effectifs avec 40 000 détenus contre 14 000 entassés au camp central.
Le nombre de Français qui ont été immatriculés au KL Neuengamme est d'environ 11 500 : 11 000 hommes et 500 femmes.
Pour leur majorité, ils font partie de cinq grands transports acheminés directement de France vers Neuengamme. Les quatre premiers partent du camp de Compiègne-Royallieu respectivement les 21 mai 1944 (plus de 2 000 hommes), 4 juin (un peu plus de 2 000 hommes), 15 juillet (plus de 1 500 hommes) et 28 juillet (plus de 1 600 hommes). Le dernier transport (plus de 700 hommes), enfin, part de Belfort-Fort Hatry le 29 août 1944.
Les autres Français ont été transférés d'autres camps de concentration, comme les femmes de Ravensbrück affectées à des Kommandos extérieurs de Neuengamme. Enfin, au moins 200 Français ont été internés au KL Neuengamme après une arrestation sur le territoire du IIIème Reich.
A partir de mars 1945, l'avance des Alliés contraint les SS à évacuer les camps de concentration. Les Kommandos extérieurs, puis le camp central de Neuengamme sont évacués au cours de « marches de la mort » et de transports meurtriers vers Bergen-Belsen, Sandbostel (Stalag X B), Wöbbelin, Gardelegen et la baie de Neustadt. Le camp central de Neuengamme est évacué à partir de la mi-avril. Les déportés restants sont transférés vers Lübeck, puis embarqués sur des navires : le Cap Arcona (4 600 hommes), le Thielbeck (2 800 hommes) qui gagne la haute mer, et l'Athen (2 000 hommes) qui fait un retour imprévu à quai pour charger de nouveaux détenus. Le 3 mai 1945, des avions britanniques, trompés sur la nature des transports, attaquent les navires en baie de Neustadt. Le Thielbeck est coulé, le Cap Arcona en feu chavire et finit par sombrer. De ces deux bâtiments, il n'y a que 450 à 500 survivants. L'Athen quant à lui est pratiquement épargné. Les troupes britanniques qui pénètrent dans le camp de Neuengamme le 5 mai 1945, trouvent un camp vide.
Sur les 106 000 déportés au KL Neuengamme et dans ses Kommandos, on estime le nombre des morts à 55 000, dont plus de 7 000 Français. Plus du quart des déportés décédés ont péri durant les toutes dernières semaines de leur déportation, au cours de leur évacuation (15 000 morts et disparus dont 7 000 en mer).[1]
Equipe du Livre-Mémorial
[1] Pour plus d’information sur l’histoire du KL Neuengamme, on peut se reporter au n°38 de Mémoire vivante, Fondation pour la Mémoire de la Déportation, juin 2003, ainsi qu’au Mémorial des Français et des Françaises déportés au camp de concentration de Neuengamme et dans ses Kommandos.